#RDC : le Dr Babah Mutuza explique pourquoi le rêve du #M23 d’atteindre #Kinshasa est « utopique ».
Alors que les rebelles de l’AFC-M23 poursuivent leur offensive armée dans l’Est de la République démocratique du Congo, sous prétexte de vouloir renverser le régime en place, le docteur Babah Mutuza, chercheur et analyste politique basé au Nord-Kivu, estime qu’il s’agit là d’un projet utopique, fondé sur une logique mensongère et politiquement intenable.
Dans un entretien accordé à la presse ce jeudi 1er mai 2025, cet expert a livré une analyse pointue, balayant d’un revers de main l’idée d’une quelconque avancée des rebelles jusqu’à Kinshasa. Pour lui, plusieurs facteurs de blocage rendent cette ambition irréaliste.
« L’AFC-M23 ne pourra pas atteindre Kinshasa. C’est une impossibilité structurelle dans le contexte actuel », affirme-t-il. Il pointe d’abord l’impopularité du mouvement auprès des populations congolaises, un facteur sociopolitique déterminant. « Les rebelles n’ont aucun ancrage populaire. Et sans soutien local, aucune rébellion ne peut progresser durablement. »
Sur le plan géopolitique, le chercheur souligne que les alliances régionales jouent en défaveur de l’AFC-M23. « Le Burundi est un allié stratégique de Kinshasa. Il bloque ainsi tout accès au Sud. La Tanzanie, membre de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC), maintient une posture de neutralité, ce qui complique tout contournement logistique par le Tanganyika ou le Lomami. »
Babah Mutuza évoque ensuite l’ambiguïté de l’Ouganda, qui représente un maillon incertain dans le dispositif régional. Selon lui, la progression vers Kisangani, étape clé vers la capitale est également compromise.
« Vers le Nord, la seule hypothèse de percée serait que l’Ouganda rompe avec Kinshasa et ouvre un second front. Ce scénario reste hautement improbable. À défaut, l’armée congolaise désormais réorganisée, mieux équipée et répartie pourrait facilement contenir une offensive unilatérale via Walikale».
L’absence d’infrastructures, un atout pour la RDC
Le chercheur insiste également sur un facteur trop souvent négligé : l’absence d’infrastructures routières adéquates, qui rend tout déploiement logistique particulièrement hasardeux pour les groupes armés.
Outre les contraintes géopolitiques, Babah Mutuza identifie des obstacles logistiques majeurs : « Même en supposant une prise de villes comme Kisangani ou Kalemie, les rebelles seraient confrontés à un casse-tête logistique. Leur artillerie ne couvre pas 2 000 kilomètres jusqu’à Kinshasa. Et il n’existe aucun aéroport d’envergure dans les zones concernées pour assurer le ravitaillement».
Il évoque également l’impossibilité d’un soutien extérieur via la Zambie ou l’Angola, deux pays alliés de la RDC. « N’oublions pas qu’en 1998, l’Angola avait repoussé une incursion rwandaise dans le Kongo Central. Aujourd’hui encore, il constitue un rempart solide contre toute avancée ennemie. »
Un dialogue de semblant, mais contraignant
Pour l’analyste, cette impasse militaire contraint le M23 à se montrer flexible, tout en explorant des options de déstabilisation plus subtiles. Il met en garde contre une répétition des schémas de 2001, lorsque le président Laurent-Désiré Kabila fut assassiné dans un climat de tension extrême.
« Conscients de leurs limites, les rebelles simulent un engagement au dialogue. Pendant ce temps, le gouvernement doit, avec l’appui des Wazalendo, rendre les zones occupées ingouvernables, les asphyxier économiquement pour provoquer une fracture entre les rebelles et la population, et faire pression sur Kigali à travers la communauté internationale», souligne notre interlocuteur.
Il renchérit en indiquant que « Le M23, de son côté, tentera de rallier des leaders locaux, d’adopter une gouvernance de façade, tout en restant sous tutelle rwandaise et ougandaise. En dernier recours, ils pourraient chercher à semer le chaos à Kinshasa par une tentative de coup d’État ou une élimination ciblée du chef de l’État. Pour éviter un tel phénomène, le gouvernement doit se rappeler de ce danger pour renforcer la sécurité dans la capitale », insiste-t-il.
La conquête de Kinshasa par les armes reste donc, selon Babah Mutuza, une illusion stratégique portée par un discours guerrier sans fondements. Entre réalités géopolitiques, contraintes logistiques et absence de légitimité populaire, les chances de succès du M23 semblent s’amenuiser jour après jour.
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